La Commission européenne a publié mi-décembre une proposition de directive pour instaurer une présomption de salariat pour les travailleurs indépendants liés aux plateformes numériques…
En Espagne, aux Pays-Bas, en Italie, en Belgique, les procédures judiciaires contre Uber et Deliveroo se multiplient sur la question des conditions de travail et le statut des chauffeurs et livreurs. La Commission européenne a décidé d’entrer formellement dans la bataille en frappant un grand coup, comme l’avait promis Ursula von der Leyen, lors de sa nomination à la présidence en 2019. La proposition de directive vise à requalifier les indépendants travaillant pour des plateformes numériques en salarié. C’est-à-dire donner aux travailleurs les prestations sociales auxquelles ils peuvent prétendre tels qu’un salaire minimum, des congés payés, des cotisations pour le chômage, l’assurance maladie, ou la retraite.
Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive pour l’Europe du numérique, a expliqué « Notre proposition de directive aidera les faux indépendants travaillant pour des plateformes à déterminer correctement leur statut professionnel et à jouir de tous les droits sociaux qui en découlent ».
Quelle différence entre un vrai
et un faux indépendant ?
Pour reconnaître les “faux indépendants”, environ 5,5 millions selon les estimations de la Commission, la directive dresse une liste de critères à destination des plateformes. Si plus de deux sont cochées, juridiquement la personne travaillant pour elle est considérée comme un salarié. Et parmi ces critères : une rémunération fixée par la plateforme, des heures de travail imposées, dicter la façon de se comporter avec les clients, l’interdiction de travailler avec un tiers, une supervision électronique de la tâche.
Uber, Deliveroo, Bolt, ou d’autres sont clairement dans le viseur de la proposition de directive. En cas de contestation, cela ne sera plus aux travailleurs de prouver sa condition d’employé, mais à la plateforme de prouver qu’il ne l’est pas. Nicolas Schmit, commissaire à l’emploi et aux droits sociaux, a déclaré « Nous devons tirer le meilleur parti du potentiel de création d’emplois des plateformes numériques. Toutefois, il nous faut également veiller à ce qu’il s’agisse d’emplois de qualité n’encourageant pas la précarité ». La directive européenne vise également à sécuriser les conditions de travail des indépendants. Les plateformes devront garantir un suivi humain de ces conditions et ne plus seulement s’appuyer sur des algorithmes. Des obligations de transparence vis-à-vis des autorités nationales sont également prévues.
Pour les plateformes, la Commission assure qu’elles ont à y gagner, en évitant les dispendieux procès où elles sont actuellement empêtrées. Problème, une fois la proposition publiée par la Commission, c’est au Parlement et au Conseil, qui réunit les chefs d’États et de gouvernement de l’Union européenne, de discuter la directive pour lui donner sa forme finale. En tant que président du Conseil, la France et donc Emmanuel Macron a la
charge d’y faire avancer les dossiers. La balle est donc dans votre camp, Monsieur le Président !
– Source : Commission européenne et Siècle Digital.